LES
ANNÉES DE FERTILISATION
Le matin, après avoir avalé la fameuse
cuillerée d'huile de foie de morue ou encore après l'avoir mélangée avec du
miel, bu son verre de thé bouillant accompagné de tartines beurrées, il est
temps de prendre le chemin de l'école. Sac de cuir au dos, nous devisons avec
des amis en allant de la Tour d'horloge puis en longeant la plage. Nous
ramassons parfois des jujubes au pied des arbres qui bordent la route. Par
journées de beau temps, nous nous regroupons par affinités et nous nous
interpellons les uns les autres. Par temps gris, nous portons nos capes à
capuchons ou nos duffle-coats et parfois des bottes de caoutchouc qui nous
donnent le grand avantage d'avoir le plaisir de patauger dans les flaques
d'eau. Nous virons à gauche et passons devant l'église puis devant l'école
arabe où les enfants sont le plus souvent assis par terre sur le coup de midi,
puis nous bifurquons à droite pour entrer à l'école de l'Alliance, l'école des
filles en premier, celle des garçons de l'autre.
Il y avait toujours un groupe réuni autour
d'acrobates grimpés sur l'arbre à réglisse au milieu de la cour. D'autres
faisaient des paris devant la longue corde à grimper. Les cris de "À
déééélivrer!" fusaient de partout. Nos récréations étaient extrêmement
bruyantes. Les jeux ralentissaient au coup de sifflet et nous nous mettions en
rang deux par deux. Tôt le matin, ou peu avant la reprise des classes à deux
heures de l'après-midi, beaucoup se
rassemblaient le long du mur qui bordait le cimetière arabe à l'arrière de
l'école. Là, les enfants creusaient la terre glaise et modelaient du mobilier,
des fruits ou des personnages qu'ils exposaient fièrement. Certains y
excellaient particulièrement. Parfois, nous nous aventurions de l'autre côté de
l'école où deux avions minuscules de couleur sable semblaient être collés au
sol. Plus loin, les dunes de sable que l'on dévalait aux cris de Tchitcha la fava ! (je n'en ai jamais
connu la signification). Après avoir pris notre élan, nous sautions et nous
roulions en cabrioles de haut en bas dans un nuage de sable pour recommencer
encore et encore.
Mr Bitton était partout à la fois. Il était le
directeur de l'école de l'Alliance qui porte le nom du célèbre consul de France
Auguste Beaumier qui dès 1866 milita en faveur de l'instruction française de
l'Alliance plutôt que celle anglaise de l'Anglo Jewish School. Les blagues relatives à sa petite taille se
muaient en admiration et quelle admiration, lorsqu'il ouvrait la bouche. Il
nous clouait littéralement sur le siège lorsqu'il nous donnait des cours de
mythologie grecque en classe de sixième. Tous se disputaient alors les
exemplaires de l'Iliade et l'Odyssée de la bibliothèque de l'école.
Monsieur Cohen dit Kéna n'était pas
conventionnel. Il ne supportait pas les manières ou les facéties. Il nous
organisait des sorties dans la nature et certains en revenaient avec des
couleuvres en cravate car il fallait surmonter l'aversion ridicule. Il faisait
l'élevage de souris blanches en classe que nous appelions du nom des héros de
bandes dessinées : Pipo, Concombre, Élastoc, Mickey, Minnie, Donald, Daisy,
Riri, Fifi, Lulu, Nif Nif, Naf Naf, Nuf Nuf et ainsi de suite. Il nous faisait
tenir un journal des souris. J'aimais
le taquiner par mes questions qui venaient justement remettre en question
certaines de ses affirmations ou analogies volontairement simplifiées à des
fins pédagogiques. Il m'appelait la barre sur le T et le point sur le i.
Le professeur Léon Benarosch était légendaire.
Tout en lui était élégance : son discours comme son parler. Son tabac
Amsterdamer parfumait la classe et il nous étonnait par ses pipes toujours
différentes. Je me demande pourquoi on s'en étonnait puisque toute la classe
lui offrait pour le nouvel an…une pipe ! Sa voix était claire et son discours
parfaitement ponctué. Il nous faisait lire des volumes que nous devions résumer
et j'avais l'habitude le jeudi soir de dicter des résumés à ceux qui voulaient
bien prendre pour moi un livre supplémentaire à la bibliothèque car j'étais un
lecteur avide. Il avait d'ailleurs le don de démasquer facilement ceux qui se
contentaient de la seule remise de résumés sans même avoir ouvert le volume et
qui avaient en plus le don de récidiver. Nous tenions des cahiers de synonymes
bien fournis, des cahiers de biographies et ses tests nous maintenaient en
forme. Il nous faisait ingurgiter de la culture et encore de la culture…
Il y avait le couple Ohayon. Lui grand et
svelte, elle courte et rondelette. Messieurs Mouryoussef, Mouyal, Cohen, Danan,
Madame Ohayon et tant d'autres encore dont le dévouement à la carrière
d'enseignant était des plus admirables.
Le chemin du retour de l'école se faisait
généralement par petits groupes et de façon ordonnée. Il y avait un vieux
gendarme que les enfants aimaient rendre fou en utilisant un sifflet identique
au sien ce qui le mettait dans une rage de lèse-majesté car il se voulait seul
à avoir cette prérogative. Le plus souvent bonhomme, il nous permettait de
toucher parfois la crosse de son pistolet en bandoulière.
Vers la fin de l'année, une fièvre
incontrôlable s'emparait des élèves qui braillaient à l'unisson durant les
derniers jours devant l'administration qui savait alors se montrer étonnement
clémente :
"Gai Gai l'écolier, c'est demain les
vacances…
Adieu ma p'tite maîtresse qui m'a donné le prix
Et quand je suis en classe qui m'a fait temps
pleurer !
Passons par la fenêtre cassons tous les
carreaux,
Cassons la gueule du maître avec des coups de belghat (babouches) !"
Ou encore :
"Iya pas de coméra (Il n'y a pas du pain) ya
sardina (il y a de la sardine) !
Iya pas de sardina
ya lcoméra !"
Ou même :
"Éteindez (Éteignez) la lumière, commencez
l'cinima (le cinéma) !"
Au programme musical s'ajoutaient d'autres
refrains tels : "Je monte sur un pommier, qui est plein de cerises,
j'entends signaler…" ou encore "Ahia
Mimouna, mimouna ya mimouna !" Cette dernière chanson tirée du
répertoire pied noir, avait une saveur particulière car l'on y singeait avec
humour la langue française. Les meneurs parmi les enfants faisaient alors état
ouvertement de leurs couleurs en scandant les chansons en tête des frondeurs
d'un jour. Les réjouissances de fin d'année se terminaient au cinéma La Scala
où nous donnions des représentations. Les représentations musicales incluaient de
la musique andalouse chantée par des cœurs et les spectacles humoristiques
avaient des sketches hilares en judéo-arabe. Nous étions parfois invités à
l'école française pour assister aux spectacles de fin d'année qui incluaient
des danses des provinces françaises et l'inévitable : "Si tous les gars du
monde décidaient d'être copains…" qui prônait l'égalité de chaque enfant
"même s'il n'est pas né en France !".
Alors que nos amis français batifolaient à la
plage, nous devions passer nos dimanches et nos vacances estivales au Talmud
Thora pour y compléter notre formation hébraïque et biblique. La discipline y
était stricte et les punitions moyenâgeuses : nerf de bœuf sur la main ou sur
la plante des pieds, ces derniers ligotés au moyen d'une falaqa turque. Cette éducation était alors réservée aux garçons. Je
parlais français à la maison et dus m'exposer à l'apprentissage de l'hébreu
traduit et commenté en judéo-arabe. Il me souvient que le directeur Rbi Haïm
Azencot me promenait les matins et me faisait réciter les leçons de chacune des
classes en répétant : « Vous voyez
le petit Dody, Prenez exemple ! C'est comme ça qu'il faut apprendre ! » On me
trouva brillant et me plaça dans la Yeshiva, avec des adolescents mûrs. Là, les
lectures talmudiques en araméen étaient traduites en judéo-arabe. Je planais.
Tout me semblait embrouillé. Seules quelques réponses maladroites de quelques
étudiants me réconfortaient en regard de ma compréhension des textes. La
pédagogie éducative consistait alors à pousser en avant ceux qui manifestaient
une certaine prédisposition à l'étude. On leur apprenait à nager en les jetant
à la mer. Et puis, il y avait le cauchemar des récréations. À la sonnerie, tous
se ruaient dans l'escalier pour aller jouer au foot sur le toit. Je voyais autour
de moi des grandes jambes qui me semblaient appartenir à un troupeau de
pachydermes en furie. Il arrivait que l'on m'écrasât et que je saignasse.
Monsieur Azincot venait alors sermonner les étudiants de monter l'escalier
lentement et sans se presser. Cette consigne tenait bon pendant vingt-quatre
heures tout au plus. La récréation était le moment où tous se défoulaient où
les paris étaient engagés sur les combats de lutte en cours. C'était pour
beaucoup de personnes la seule récréation estivale.
Deux éducateurs me forgèrent au Talmud Thora de
Mogador au Maroc et surent tout autant retenir et captiver mon imaginaire
d'enfant : Rbi Yitshaq Haroche et Rbi
Ms'eud Elkabas. Rbi Yitshaq Haroche avait pour habitude de nous enseigner
tantôt le livre des Juges et tantôt le livre des Rois tout en tenant ouvert
devant lui le quotidien de l'époque, Le Petit Marocain. Tout en nous informant
de l'actualité, il faisait des connections et des rapprochements avec tel ou
tel autre épisode de la Bible, le tout avec un grand sens de l'humour très
apprécié de ses élèves. À quelqu'un qui jetait son chewing gum par la fenêtre
en prétendant n'en avoir pas mastiqué, il élaborait des scénarios complexes
relativement à des fourmis innocentes écrasées et collées ou des personnes non prédestinées
qui se retrouvaient à partager une intimité indécente. Il vainquait par
l'humour. Pour sa part, Rbi Ms'eud Elkabas nous enseignait le Talmud la semaine
durant. Cela était ardu. J'avais alors 8 ans et il nous fallait saisir au vol
les subtilités talmudiques exprimées en araméen, en hébreu et en judéo-arabe.
Rbi Ms'eud Elkabas parvenait à nous tenir en haleine jusqu'au vendredi matin.
Ce jour là, les livres étaient fermés, et il nous contait des ma'asiyoth, c'est-à-dire des faits de l'histoire juive. Sa voix douce
et sereine voguait dans un grand silence alors qu'il relatait des épisodes du
judaïsme marocain où intervenaient rabbins, sultans et rois d'Espagne. Ces deux
éducateurs ont réussi à me présenter la Bible sous un visage humain et à me faire
sentir que le passé, que ce soit celui de l'Esclavage en Égypte, celui de la
royauté glorieuse d'Israël, celui des affres de l'Exil ou celles des horreurs
de l'Inquisition constituait un passé bien vivant en moi. Alors, qu'il se soit
agi d'un passé historique et lointain,
sa réalité n'en était pas moins des plus présentes dans ma chair. Tous les
rêveurs et les persécutés de l'histoire juive revêtaient le visage de mes
grand-parents et, tel un chevalier du Moyen Âge, je me promettais déjà de les
protéger avec vaillance.
À l’âge de dix ans, nous déménageâmes à
Casablanca. Je continuais mes études au Cours complémentaire de l’Alliance
israélite universelle. Quelle famille ! Nous rêvions, nous nous amusions, nous
passions des billets doux laissant éclater l'imagination de nos fantasmes.
C'était l'époque des blousons de cuir, des motocyclettes et du cran à l'Elvis
Presley. Jerry Lewis faisait notre bonheur. Ray Charles, Johnny Holiday,
Richard Anthony et les Chaussettes noires étaient à la mode. Nous nous passionnions
sur le sort de Caryl Chessman qui encourait une peine de mort repoussée moult
fois. Pour nous repêcher, nos professeurs usaient de morale, d'humour, de
compassion, voire de menace. Ils avaient tant envie de nous voir réussir que
cela en crevait les yeux.
Il y avait le couple rassurant des Altun, tous
deux profs de français : le mari guilleret et sa femme posée ; les profs de
maths Bréart aux interjections brusques et
Gomel, qui se voulait charmeur ; Madame Lévy aussi charmante que stricte
; les professeurs d'arabe Lévy - le syndicaliste et communiste déclaré - et
Cohen - spécialiste des punitions écrites ; la prof de musique Madame Obadia à
la voix enchanteresse ; Marelli aux compétences littéraires exceptionnelles ;
les professeurs d'hébreu Nahon aux adjectifs grandiloquents et Claude Sultan
qui savait mater les plus durs par le contenu de son cours ; le couple Benaroya
qui enseignait l'anglais et l'histoire : Lui petit de taille et jovial et elle langoureuse mais stricte ; la belle
et envoûtante madame Zrihen professeur de sciences naturelles qui octroya une
gifle cinglante à mon ami Jacky Pinto qui, en leçon d'anatomie, l'avait scrutée
attentivement en répondant que le corps humain était… harmonieux ! Madame
Ohayon prof de géographie qui avait en sainte horreur les courants d'air et
l'ineffable professeur de physique-chimie, Monsieur Wazana, haltérophile et
démonstrateur. Il s'engageait dans des trépieds interminables, plaçait ça et là
quelques expressions d'arabe dialectal qui nous familiarisaient avec la
matière. Comment s'y prenait-elle ? Madame Guéron arrivait à nous faire réciter
des chapitres d'histoire entiers de Jules Isaac ! Elle était la motivation
même. Et son mari, courtois et fascinant, dirigeait l'école avec un doigté
rare. Madame Ifrah, toujours en survêtement, haranguait les classes de
gymnastique avec autorité et un humour mordant.
Nous étions entourés, cajolés mais le rendions
bien à nos professeurs. Le désordre qui régnait dans les récréations laissait
place à un envoûtement engageant sitôt nos bancs rejoints. C'était l'époque des
crises d'adolescence difficiles et il n'en fallait pas beaucoup pour prendre la
tangente en dehors des sillons de l'étude. L'orchestration de l'école était
telle que tout un chacun avait droit à une attention personnelle malgré les
gaffes ou les mauvaises farces.
À l'âge de 15 ans, je passais de l'école du
Cours Complémentaire de l'Alliance au Lycée Lyautey. Les ondes radiophoniques
vibraient alors avec Françoise Hardy et Marie Laforêt et les Beatles commençaient
tout juste à percer. C'était l'époque des yéyé. Quel choc ! Autant l'atmosphère
familiale était présente à l'Alliance israélite, autant elle était
impersonnelle au lycée. Les professeurs y cultivaient leur légende. Tout celui
qui s'aventurait à poser une question s'exposait aux sarcasmes narquois du
prof. Autant donc ne pas se mouiller et cultiver ses incertitudes à moins de
rouler la question de telle sorte que le prof dans sa grande mansuétude et son
éminente condescendance sourcille des yeux et prenne un temps de réflexion
avant de répondre. La terreur était ambiante et palpable. Les questions orales
trouvaient devant elles des élèves rongés par le trac. La menace d'être envoyé
chez le proviseur haut juché et sentencieux était la quintessence de la
mauvaise augure.
Et pourtant, nous arrivions à nous y faire et
même de temps en temps à en rire. Les récréations surtout. Les plus macho des
français racontaient leurs week-ends débauchés en traitant tout celui qui en
doutait de puceau. Bien des fils à papa ne s'en faisaient pas pour leurs études
- ou du moins le décriaient-ils - et comptaient qui sur leur fortune, qui sur
leur particule pour se frayer un chemin dans la vie. Certaines séances de
bizutage des classes supérieures en début d'année étaient drôles comme tout,
d'autres étaient particulièrement odieuses. Juifs dans une école française en
pays musulman, nous avions droit aux congés des trois religions et cela était
fortement jalousé par nos camarades français qui n'avaient droit qu'aux fêtes
fériées chrétiennes et musulmanes. Certains de nous refusaient de venir en
classe le samedi, d'autres se permettaient de venir mais pour écouter
seulement, d'autres encore participaient normalement. Il y avait peu d'Arabes
en classe. Ils étaient généralement discrets et une proportion importante
proférait un marxisme salutaire. La douce cruauté des Français qui attendaient
la période du jeûne du Ramadan pour entrer en classe avec des sandwiches au
jambon odorants !
Il y avait des professeurs brillants par leur
clarté d'esprit et leur démarche intellectuelle cartésienne. D'autres moins
sûrs d'eux-mêmes, se renfermaient dans leur carapace disciplinaire. Chacun
avait un cachet, des manies, des expressions récurrentes ou encore des colères
prévisibles. Ils nous offraient l'excellence et nous devions évoluer tel des
équilibristes au sein du créneau exigu de liberté surveillée pour atteindre les
cimes auxquelles on nous prédestinait. La recette de la réussite résidait dans
le labeur et l'assiduité sans équivoque. À de rares exceptions près, les profs
étaient inabordables.
Alliance et Talmud Thora à Mogador, Cours complémentaire et Lycée Lyautey à
Casablanca. Ce cheminement fut celui de nombreux de mes amis. Tout ce monde est
maintenant dispersé aux quatre vents. Il m'a rarement été donné de rencontrer
mes meilleurs amis de classe. Parfois, j'entends parler de certains. Les grands
flux d'écoliers avec leurs héros, leurs champions ou leurs meneurs ont dû
interrompre leur cours pour dériver vers de nouveaux océans et horizons. Il ne
reste plus que les bâtiments témoins de notre passage et de nos grivoiseries
et, les échos des bruits familiers qui surgissent du fond de la mémoire comme
s'il ne s'agissait que d'un événement encore tout frais. Certains épisodes
brefs résonnent encore en moi tel un film projeté au ralenti. D'autres épisodes
s'étalant sur de longues périodes me reviennent fulgurants et fugaces tout à la
fois. La mémoire relativise les événements et leur durée et ne conserve d'eux
que certains points de repère, retenus selon des critères qui lui sont propres,
et qui jalonnent le cours de toute une vie. Et, tel un phare dans un océan en
furie, l'exemple donné par les professeurs compétents et dévoués continue de
guider nos pas dans la course de la vie. Qu’il me soit permis de rendre hommage
à une kyrielle de professeurs et de formateurs de l’esprit et de l’intellect
qui sont toujours présents en moi, à l’ensemble des professeurs
extraordinaires, dévoués à leur mission d’enseignants et à la transmission
fidèle des Lettres, des Arts, des Sciences et de l’Éthique. J'émets le souhait
que l'on puisse transmettre à son tour avec la même ferveur et la même dévotion
le goût de l'étude et celui de la transmission du goût de l'étude.
Extrait
de l’ouvrage «Témoignages. Souvenirs et réflexions des anciens de l’Alliance
israélite universelle», les Éditions Du Lys, 2002